Le droit de grève est-il démocratique ?

Le droit de grève est-il démocratique ?

Le champ lexical autour de la grève est fleuri ! Si l’expression “prendre la France en otage” est un grand classique, ses conséquences ont aussi été revisitées dernièrement. Pour le gouvernement et notamment son porte-parole Olivier Véran, la grève, c’est le « risque d’une catastrophe écologique, agricole et sanitaire ». La grève serait donc la mise en danger économique, sociale et écologique de l’ensemble de notre société, mais aussi anti-démocratique.

À l’heure ou les syndicats appellent à une grève générale et illimitée contre la réforme des retraites, qu’en est-il ?

Un droit constitutionnel et fondamental

Le droit de grève en France est protégé par la Constitution depuis 1946 et reconnu comme un droit fondamental pour les travailleur·ses. Également reconnu comme un droit fondamental dans de nombreux pays, les règles et les conditions régissant son exercice peuvent cependant varier d'un pays à l'autre. En Allemagne la grève est soumise à des règles plus strictes et est souvent limitée aux négociations collectives sur les salaires et les conditions de travail. En Suisse, le droit de grève n'est pas inscrit dans la Constitution et est limité par des dispositions légales qui imposent des restrictions sur sa durée et son but.

En France, contrairement à beaucoup de pays : 

  • Les syndicats peuvent organiser des grèves générales illimitées
  • Les travailleur·euses qui font grève sont protégé·es par la loi française. Ils et elles ne peuvent pas être licenciés ou soumis à des représailles pour avoir participé à une grève.
  • Les travailleur·ses du secteur public ont le droit de faire grève


Un outil de mobilisation citoyenne face aux manquements de la démocratie


Dans son essai "Réflexions sur la guillotine", Albert Camus écrit : "La grève, c'est-à-dire l'interruption volontaire et collective du travail, est un des seuls moyens qui reste à l'homme pour protester contre des conditions injustes et inhumaines". Camus considérait la grève comme une expression de la résistance face à l'oppression économique et politique.

Sebastian Schulz conclut sur Mediapart que si la grève est le seul moyen pour un groupe d'individus de s’extraire du gouvernement d’autrui afin de se gouverner eux-mêmes, c’est-à-dire d'avoir un quelconque pouvoir sur leur propre existence, l’acte de grève est bien démocratique.

À un moment où notre démocratie représentative est à bout de souffle, la démocratie sociale devrait être considérée comme une chance pour revitaliser l’engagement civique. Plutôt que d’affaiblir les mouvements sociaux et l’engagement syndical nous devrions au contraire encourager les citoyen·es à utiliser tous les moyens possibles pour exprimer une opinion. 

Un outil fondamentalement écologique et antiproductiviste

Les grèves ont poussé et accéléré les grandes révolutions sociales. Ce fut le cas lors des grandes grèves générales et populaires comme en 1936, 1968 ou 1995. Aujourd’hui, elles sont un moyen de défendre les acquis sociaux, comme c’est le cas actuellement avec la réforme des retraites.

La grève peut et doit servir à accélérer les grandes transformations écologiques et sociales nécessaires pour préserver les conditions de notre vie sur terre. Parce que la grève ralentit la production, c’est donc, aussi, un outil fondamentalement écologique qui s’oppose à une logique de travailler plus pour produire et consommer plus et ainsi … polluer plus.

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